Dans Unrest, on ne peut que remarquer l’immense sourire de son auteure. Les yeux brillants de joie d’une enfant gaie et pleine de vie, le sourire d’une jeune femme brillante de 28 ans. Elle est doctorante à Harvard, a l’avenir devant elle, l’amour est déjà là.

Elle a le sourire d’une vie dont on est certain qu’elle tiendra toutes ses promesses.

Et pourtant, Jennifer Brea, l’auteure et réalisatrice de ce film documentaire, tombe brutalement malade d’une maladie tellement peu connue qu’il lui faudra des années pour être diagnostiquée.

En attendant, d’expériences ratées en rendez-vous médicaux inutiles voire mortifères – on lui a même diagnostiqué un trouble de conversion (autrement dit l’hystérie) – Jennifer apprend sur sa maladie. Elle se rend compte, magie d’internet et des réseaux sociaux, que des milliers de malades sont comme elle, enfermés la plupart du temps dans leur chambre.

Jennifer, dont la détermination force l’admiration, décide d’en faire un film. Pendant des mois, elle interview des spécialistes de l’Encéphalomyélite Myalgique, nom barbare d’une maladie qui ne l’est pas moins.

Elle parle à des malades et elle se filme elle-même, avec l’aide de son mari, dans les situations les plus terrifiantes. Le cerveau qui « plante » et oublie les mots, le corps entier qui se met à trembler, la fièvre qui ne la quitte pas. Elle nous permet de nous rendre compte de la vie dramatique qu’ont à subir certains de ces patients, dont on dit à la plupart que leur maladie est dans leur tête. Une jeune fille enlevée à la garde de ses parents pour être envoyée en hôpital psychiatrique ; un jeune garçon, ancien champion de ski, condamné à regarder la neige par sa fenêtre ; un jeune homme qui, après avoir parcouru le monde en photographe, vit aujourd’hui dans le noir et le silence absolu. Sa mère, le surveillant par le trou de la serrure de peur qu’il ne se suicide. Son père, Ron Davis, professeur de biochimie et de génétique, cherchant à faire avancer coûte que coûte la recherche pour sauver son enfant. Et les milliers d’autres avec eux.

Le sujet d’Unrest est lourd. Il est effrayant aussi tellement il donne l’impression que cette horrible maladie peut tomber sans raison sur n’importe qui. Néanmoins, est-ce dû au lumineux sourire de Jennifer Brea ? Qui jamais ne tombe dans le pathos. A l’amour inconditionnel de son mari ? Ou à la formidable solidarité qui semble exister entre les membres de cette communauté ? On ressort d’Unrest avec l’envie d’en découdre. Le courage de ces malades, l’amour qui jaillit malgré tout de ces situations dramatiques, nous remuent et nous boostent prodigieusement. On a envie de profiter plus fort encore de la vie et, pourquoi pas, de les aider si on le peut.

Premier pas : Osez regarder ce prodigieux documentaire, maintes fois primé (Prix spécial du jury du Festival de Sundance, mais pas que…). Car, devant la montagne de souffrance que vivent les patients atteints d’Encéphalomyélite Myalgique, on se dit qu’on leur doit, pour le moins, de trouver en nous le courage de les regarder sans faillir.

Unrest de Jennifer Brea, 2018.
Sur Netflix actuellement.
Et aussi sur Vimeo, Amazon Vidéo, Vudu, I Tunes et en DVD.

Pour aller plus loin :

La France n’est bien sûr pas épargnée par l’Encéphalomyélite Myalgique. Elle compterait plusieurs centaines de milliers de personnes atteintes, dont la grande majorité ne sont pas diagnostiquées. La maladie reste non reconnue par les instances nationales et la prise en charge des malades est quasiment inexistante.

Il existe en France deux associations qui œuvrent à la reconnaissance de l’Encéphalomyélite Myalgique :

Le 12 mai est la journée internationale de reconnaissance de l’Encéphalomyélite Myalgique.

Le 8 août 2020 est la journée de visibilité des malades en état sévère.